mardi 9 février 2016

Le plus gros mensonge de l'école québécoise (JDM et JDQ) : réponse à Mario Asselin

J’aime lire Mario Asselin. Pour l’enseignant que je suis, ses articles sont souvent intéressants et bien documentés. C’est pourquoi son texte intitulé Le plus gros mensonge de l’école québécoise m’a franchement déçu. En décembre dernier, j’avais des choses à dire à propos de sa révélation, mais j’étais occupé à écrire sur l’intégration des enfants immigrants (publication du 19 décembre).

Pourquoi prendre le temps de répondre aujourd’hui ?  C’est que monsieur Asselin a fait un classement de ses publications les plus populaires de 2015 et cet article arrive au premier rang. Bref, il mérite encore une réponse !

D’emblée, il faut reconnaître que le titre est un brin prétentieux. Déclarer aux lecteurs d’un journal que « … le principal mensonge du réseau scolaire au Québec : tous apprendre à la même vitesse dans une classe, c’est bien mieux ! » sous-entend que nous détenons la vérité.

En lisant ce texte, ça m’a rappelé mon enfance. Vous savez, je suis de l’époque où les parents fréquentaient l’église le dimanche matin. Je me souviens très bien du déroulement de la célébration. Il y avait toujours un moment où le curé nous entretenait de divers sujets. Mes parents appelaient ça le sermon. C’est exactement ce que nous sert M. Asselin : un texte moralisateur.

D’ailleurs, je me suis surpris à l’imaginer apparaître en soutane au micro. À écouter cette grande vérité qui est la sienne. Je l’entends déjà dire : « Mes chers paroissiens, nous vivons dans le péché… Le mensonge est parmi nous. L’école est un lieu de perdition pour nos petites brebis ». L’air penaud devant tant de révélations criantes de vérité, je le confesse : « Excusez-moi, j’ai péché. J’enseigne dans une école publique. Je suis un menteur. »

Tout comme le curé attirait les foules avec ses histoires de peur, monsieur Asselin attire aussi  un grand nombre de lecteurs avec son titre qui punch. A-t-il raison pour autant ? Est-ce vraiment le véritable enjeu de l’école québécoise ? Un peu comme le curé de mon enfance, je me dis qu’il est légèrement dépassé par les événements. Qu’il devrait peut-être se promener dans sa paroisse afin de découvrir ce qui se passe sur le terrain.

Une partie de l’explication qui sous-tend cette démonstration douteuse est associée à un philosophe allemand. La référence, s’il en est une, invoque deux motifs pour « révolutionner l’école ». Voici ce que j’en pense :
  1. À propos du premier argument, mon père aurait pu lire la même chose en 1960. C’était vrai hier et ça l’est encore aujourd’hui. De plus, lorsqu’on parle d’intelligence relationnelle, il est possible d’associer cela à l’une des trois missions de l’école : la socialisation. Il est souvent question de qualification au Québec. Rarement discute-t-on  d’instruire et de socialiser. Pourtant, ces deux axes sont aussi importants, sinon plus que la simple qualification.
     
  2. À propos du second argument, force est de constater qu’il est vrai. Le monopole de la connaissance appartient maintenant au monde virtuel. Un peu comme à l’époque où la connaissance appartenait à l’église !  D’où l’importance accrue de l’école d’aujourd’hui. C’est une chose d’accumuler des connaissances. Encore faut-il apprendre à apprendre. Encore faut-il diversifier et évaluer ses sources. Encore faut-il comprendre et être capable de transférer ses connaissances. L’école a toujours le devoir de former des citoyens éclairés et capables d’exercer un jugement critique.
Enfin, monsieur Asselin semble oublier que l’école n’a jamais été aussi homogène. Le Québec est le champion canadien de la fréquentation de l’école privée. Que pour concurrencer l’école privée, l’école publique a fait le choix de la diversification. Que les élèves qui fréquentent ces programmes sont souvent triés en fonction des résultats et des revenus. Il est alors facile de répliquer que les enseignants de ce type de clientèle ont très peu de différenciation à faire.

Il reste donc les grands oubliés du système d’éducation du Québec. Ceux que l’on néglige depuis une quinzaine d’années. Les élèves des classes dites régulières de l’école publique. Avec un peu de lecture, nous sommes rapidement en mesure d’identifier plusieurs mensonges beaucoup plus importants que celui de la vitesse d’apprentissage dans une classe. Vous voulez vraiment le plus gros mensonge ? Faire croire au peuple que l’éducation est importante au Québec.

Afin de corriger la situation, il est impératif de créer un projet de société qui ne soit ni politique, ni patronal, ni syndical, seulement original, intelligent et plein de gros bon sens. Selon la Bible, la foi transporte les montagnes… Je vous jure qu’il en faudra de la foi, monsieur le curé, si je veux assister à ce miracle.

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