samedi 27 février 2016

En vert et contre tous dans le but d'aider les amis dans le rouge ?

C'est la semaine de relâche ! J'ai décidé d'en profiter et de m'offrir une petite pause. Bref, j'oublie l'éducation pour un instant. Ma formation de biologiste me pousse à m'intéresser au dossier Anticosti... J'ai donc décidé de me faire plaisir.

En vert et contre tous dans le but d'aider les amis dans le rouge ?

Vert, la couleur de l’espoir. La couleur des amants de la nature. La couleur des grandes valeurs environnementales. Je rêve ou quoi ? Avons-nous un nouveau gouvernement libéral au pouvoir ? Est-ce que la participation du Québec à la COP21 a généré l’illumination divine chez le Premier ministre ? À écouter le petit ange qui souffle un vent d’espoir à mon cerveau, c’est peut-être possible…

Néanmoins, il y a aussi un diablotin qui ne cesse de tourmenter ma conscience. Et si ce n’était que de la poudre aux yeux ? Vraisemblablement, la commission Charbonneau nous a appris à nous méfier du pouvoir politique. Parfois, j’aimerais bien être un journaliste à l’émission Enquête.
Avec le prix du baril de pétrole en chute libre, il est facile de comprendre que l’exploitation d’Anticosti n’est guère intéressante en ce moment. Dès lors, plusieurs questions surgissent de mon imaginaire. Qui sont les véritables propriétaires des droits ? Je ne parle pas ici des compagnies, mais bien des actionnaires. Sont-ils des amis du parti ? Ont-ils besoin de liquidité en ces temps difficiles ? Veulent-ils faire un coup d’argent ? Combien coûtera le bris du contrat ? S’il s’agit d’une somme considérable, à qui donc profiteront ces dollars ?
Pour le moment, le Premier ministre passe honorablement pour un ardent défenseur de l’environnement. Par le fait même, son discours entraîne la baisse de la valeur de certaines actions. C’est le temps d’acheter mes amis ! Les marchés financiers finiront bien par se redresser et il sera possible de récolter la manne. En attendant, le bonus du bris de contrat fera patienter et sourire tous les copains.
Ce gouvernement libéral a toujours souhaité l’exploitation des hydrocarbures. Et si le vert était la couleur de la chance qui frappe ces satanés investisseurs ? Je crois que mon petit diable amoureux de la couleur de l’enfer a probablement raison. Cette récente conversion ressemble étrangement à une vilaine mascarade dans le but d’aider les amis amateurs de rouge.
Si l’avenir donne raison au côté obscur de la force, je crois que je deviendrai rouge de colère ou vert malade. Peu importe,  j’aurai certainement une petite pensée pour mon ange candide. Je me dirai qu’encore une fois, je rêvais en couleur d’espérer qu’un politicien puisse se tenir debout par simple conviction.


mardi 9 février 2016

Le plus gros mensonge de l'école québécoise (JDM et JDQ) : réponse à Mario Asselin

J’aime lire Mario Asselin. Pour l’enseignant que je suis, ses articles sont souvent intéressants et bien documentés. C’est pourquoi son texte intitulé Le plus gros mensonge de l’école québécoise m’a franchement déçu. En décembre dernier, j’avais des choses à dire à propos de sa révélation, mais j’étais occupé à écrire sur l’intégration des enfants immigrants (publication du 19 décembre).

Pourquoi prendre le temps de répondre aujourd’hui ?  C’est que monsieur Asselin a fait un classement de ses publications les plus populaires de 2015 et cet article arrive au premier rang. Bref, il mérite encore une réponse !

D’emblée, il faut reconnaître que le titre est un brin prétentieux. Déclarer aux lecteurs d’un journal que « … le principal mensonge du réseau scolaire au Québec : tous apprendre à la même vitesse dans une classe, c’est bien mieux ! » sous-entend que nous détenons la vérité.

En lisant ce texte, ça m’a rappelé mon enfance. Vous savez, je suis de l’époque où les parents fréquentaient l’église le dimanche matin. Je me souviens très bien du déroulement de la célébration. Il y avait toujours un moment où le curé nous entretenait de divers sujets. Mes parents appelaient ça le sermon. C’est exactement ce que nous sert M. Asselin : un texte moralisateur.

D’ailleurs, je me suis surpris à l’imaginer apparaître en soutane au micro. À écouter cette grande vérité qui est la sienne. Je l’entends déjà dire : « Mes chers paroissiens, nous vivons dans le péché… Le mensonge est parmi nous. L’école est un lieu de perdition pour nos petites brebis ». L’air penaud devant tant de révélations criantes de vérité, je le confesse : « Excusez-moi, j’ai péché. J’enseigne dans une école publique. Je suis un menteur. »

Tout comme le curé attirait les foules avec ses histoires de peur, monsieur Asselin attire aussi  un grand nombre de lecteurs avec son titre qui punch. A-t-il raison pour autant ? Est-ce vraiment le véritable enjeu de l’école québécoise ? Un peu comme le curé de mon enfance, je me dis qu’il est légèrement dépassé par les événements. Qu’il devrait peut-être se promener dans sa paroisse afin de découvrir ce qui se passe sur le terrain.

Une partie de l’explication qui sous-tend cette démonstration douteuse est associée à un philosophe allemand. La référence, s’il en est une, invoque deux motifs pour « révolutionner l’école ». Voici ce que j’en pense :
  1. À propos du premier argument, mon père aurait pu lire la même chose en 1960. C’était vrai hier et ça l’est encore aujourd’hui. De plus, lorsqu’on parle d’intelligence relationnelle, il est possible d’associer cela à l’une des trois missions de l’école : la socialisation. Il est souvent question de qualification au Québec. Rarement discute-t-on  d’instruire et de socialiser. Pourtant, ces deux axes sont aussi importants, sinon plus que la simple qualification.
     
  2. À propos du second argument, force est de constater qu’il est vrai. Le monopole de la connaissance appartient maintenant au monde virtuel. Un peu comme à l’époque où la connaissance appartenait à l’église !  D’où l’importance accrue de l’école d’aujourd’hui. C’est une chose d’accumuler des connaissances. Encore faut-il apprendre à apprendre. Encore faut-il diversifier et évaluer ses sources. Encore faut-il comprendre et être capable de transférer ses connaissances. L’école a toujours le devoir de former des citoyens éclairés et capables d’exercer un jugement critique.
Enfin, monsieur Asselin semble oublier que l’école n’a jamais été aussi homogène. Le Québec est le champion canadien de la fréquentation de l’école privée. Que pour concurrencer l’école privée, l’école publique a fait le choix de la diversification. Que les élèves qui fréquentent ces programmes sont souvent triés en fonction des résultats et des revenus. Il est alors facile de répliquer que les enseignants de ce type de clientèle ont très peu de différenciation à faire.

Il reste donc les grands oubliés du système d’éducation du Québec. Ceux que l’on néglige depuis une quinzaine d’années. Les élèves des classes dites régulières de l’école publique. Avec un peu de lecture, nous sommes rapidement en mesure d’identifier plusieurs mensonges beaucoup plus importants que celui de la vitesse d’apprentissage dans une classe. Vous voulez vraiment le plus gros mensonge ? Faire croire au peuple que l’éducation est importante au Québec.

Afin de corriger la situation, il est impératif de créer un projet de société qui ne soit ni politique, ni patronal, ni syndical, seulement original, intelligent et plein de gros bon sens. Selon la Bible, la foi transporte les montagnes… Je vous jure qu’il en faudra de la foi, monsieur le curé, si je veux assister à ce miracle.

mardi 2 février 2016

Réponse à Michel Kelly-Gagnon (JDM) : L'école privée profite à tous les élèves québécois.


D'emblée, je dois dire que j'aime bien lire les publications de l'Institut économique de Montréal (IEDM). Non pas que je partage l'idéologie des principaux acteurs, mais parce que les opinions diverses permettent de prendre le temps de réfléchir.

Par contre, je dois avouer que l’article douteux L’école privée profite à TOUS les élèves québécois m'indispose. Pourquoi ? Parce que son auteur signe ce texte à titre personnel. Et alors, me direz-vous ? En tant que citoyen, monsieur Kelly-Gagnon a tout de même bien le droit de choisir l'argumentation qui fait son affaire. À sélectionner des extraits appuyant ses convictions. Vous avez raison. Quel est donc le problème ?

C’est que l’en-tête de l’article affiche le gros titre bien visible Blogue de l'Institut économique de Montréal. À partir du moment où un journal vous offre une tribune, vous avez le devoir moral de faire preuve d’un minimum de rigueur. Question d'ajouter un peu de crédibilité à ses propos et de convaincre son lectorat, le président et directeur général de l’IEDM utilise à fort mauvais escient l’espace médiatique que le Journal de Montréal veut bien accorder à son institut. Les lecteurs carburent aux grands titres. Utiliser la marque de commerce de l’IEDM afin de diffuser votre propagande personnelle relève d’une malhonnêteté intellectuelle crasse.

Je crois qu’une minorité de lecteurs pousseront davantage la réflexion et la recherche quant au texte de M. Kelly-Gagnon. De ce fait, ce genre de publication fait un ravage considérable auprès de l’opinion publique.

Imaginez un instant que je suis le président et directeur général de l’Institut scientifique national d'éducation publique. En utilisant la même technique que M. Kelly-Gagnon, je pourrais donc répliquer de la sorte à son article :

L’école privée NE profite PAS à tous les élèves québécois

D’abord, soulignons que l'une de vos références, Francis Vailles (La Presse, 2015), soulève quelques nuances importantes quant aux conclusions du professeur Lefebvre :
Cela dit, l'étude ne mesure pas à proprement parler l'effet sur les résultats de la sélection des élèves dans certaines écoles. De plus, la forte croissance du privé au secondaire ces dernières années au Québec devrait avoir un impact sur les résultats moyens des élèves, ce que l'étude ne capte pas.

Enfin, on ne sait pas jusqu'à quel point la composition de plus en plus difficile des classes du public tire les résultats vers le bas et contrebalance négativement les effets du privé.
À cet égard, un comité d'experts concluait, en juin 2014, que la ségrégation des élèves en fonction de leurs aptitudes ou de leurs origines socioéconomiques est nuisible.
« De nombreux chercheurs arrivent à la conclusion qu'une plus grande mixité des élèves au regard de leur genre ainsi que de leur origine sociale et ethnique influence positivement la réussite de tous les élèves. Ainsi, les élèves qui sont plus à risque d'échouer pour des raisons liées à leur statut socioéconomique ou à leur origine ethnique bénéficient significativement de la présence d'élèves forts dans leur classe, alors que les élèves forts ne sont pas pénalisés par la composition hétérogène de leur classe. »
Ensuite, selon Marc St-Pierre (chargé d'enseignement en administration scolaire, Université du Québec en Outaouais et consultant en éducation):
Le Québec, qui s’est si bien démarqué aux derniers tests PISA, malgré son 1er rang canadien en mathématiques chez les jeunes de 15 ans, est, avec l’Alberta, la province canadienne où les écarts de réussite sont les plus grands en fonction du statut socioéconomique, là aussi où il y a la plus faible proportion d’élèves jugés « résilients », c’est-à-dire ces jeunes qui font mentir les probabilités en réussissant contre toute attente.
Le Québec partage donc avec l’Alberta conservatrice la palme du système d’éducation le moins équitable au Canada. Alors que nous sommes premiers de classe en mathématiques au pays, nous sommes en fait les derniers au Canada pour ce qui concerne nos élèves les plus vulnérables. Alors que nos élèves les plus forts réussissent en général mieux que les autres élèves « forts du Canada », nos élèves « faibles » sont plus faibles que leurs collègues canadiens…On est loin du rêve d’équité et de la promesse d’offrir à chacun la meilleure éducation possible. On est plutôt dans une espèce de logique qui voudrait que chaque enfant ait droit à une éducation meilleure…que celle des autres !
Enfin, Mauricio Segura (L'actualité, 2014) affirme à propos de la Finlande qui attire chaque année une cinquantaine de délégations étrangères :
Elles s’y rendent parce que, depuis 2000, ce pays de 5,3 millions d’habitants est le premier de classe en Occident dans l’enseignement au primaire et au secondaire, selon le Programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves de 15 ans en mathématiques, sciences et lecture (connu sous le nom de PISA).
Or, la Finlande a aboli les écoles privées dans les années 1970. « Si vous permettez l’existence de l’école privée, vous ne pouvez garantir l’égalité des chances, principe qui tient à cœur aux Finlandais et qui sous-tend tout notre système d’éducation », estime Pasi Sahlberg (cadre au ministère de l’Éducation et de la Culture, ambassadeur international du système d’éducation finlandais et auteur de l’essai Finnish Lessons : What Can the World Learn From Educational Change in Finland ?)
Intéressant, n’est-ce pas ?
À titre de président et directeur général de l’Institut scientifique national d'éducation publique, je pourrais aussi écrire de beaux textes d’opinion … Il suffirait seulement qu’un journal m’offre un espace publicitaire propice à la diffusion de ma propagande.